RJDH : Abbé Xavier-Arnauld FAGBA, vous êtes le Cérémoniaire liturgiste de l’Archidiocèse de Bangui et Curé de la paroisse Saint Jacques de Kpete
RJDH : Abbé Xavier-Arnauld FAGBA, vous êtes le Cérémoniaire liturgiste de l’Archidiocèse de Bangui et Curé de la paroisse Saint Jacques de Kpetene, Bonjour !
Père A. FAGBA : Bonjour cher journaliste !
RJDH : Le monde célèbre le 1er novembre de chaque année la toussaint. Quelle est la signification de cette fête et d’où est ce qu’elle tire son origine ?
Père A. FAGBA : La fête de Toussaint, est une fête religieuse d’origine chrétienne. Comme son nom l’indique, elle est la fête de tous les saints, qu’ils soient connus ou inconnus. Car, l’Eglise considère que beaucoup d’autres Saints ont vécu au service de Dieu sans pour autant être reconnus, dans le canon de l’Eglise. C’est pourquoi, la Toussaint vise à célébrer tous ces saints, connus comme inconnus. Qu’en est-il du sens accordé à cette Fête, disons de sa signification ?
D’abord, en célébrant la Toussaint, l’Eglise nous invite à honorer la foule innombrable de ceux et celles qui ont été de vivants et lumineux témoins du Christ. Ils sont pour l’Eglise des témoins-entrainants, je voudrais dire, des témoins à imiter à la suite du Christ.
Par cette fête également, l’Eglise catholique trouve aussi l’occasion de rappeler à ses fidèles que tous les hommes sont appelés à la sainteté, et bien sûr par des chemins différents, parfois surprenants ou inattendus, mais accessibles. Nous célébrons ce que nous serons demain, ou ce que nous espérons être demain.
Pour son origine, bien qu’elle soit très ancienne, la fête de Toussaint a une origine assez complexe. Je le dis complexe à cause de la fixation de son contenu. Instituée par l’Église, la fête de la Toussaint célébrait d’abord et avant tout la commémoration de tous les martyrs, et était célébrée quelques jours après la Pentecôte. Puis, elle fut passée de la fête des Martyrs à la fête des Saints, mais rattachée à la Pentecôte. Le pape Boniface IV décidait pour le fait même, depuis l’an 610, d’instaurer la commémoration régulière chaque le 13 mai. Le pape Grégoire III viendra un siècle plus tard l’instituer comme désormais célébrer le 1er Novembre. Et en 835, le pape Grégoire IV va même l’imposer dans l’ordo romain pour que cette fête soit célébrée dans le monde entier.
Pour dire, vu ce parcours que je viens de tracer, il se dégage que la fête de Toussaint est une institution pure et dure de l’Eglise catholique, mais dont la célébration s’étend quasiment désormais à tous.
RJDH : D’aucuns confondent la toussaint le 1er et le jour des mort 02 novembre, quelle différence faites-vous entre ces jours ou encore célébrations ?
Père A. FAGBA : La première difficulté est le fait que les deux célébrations se suivent, si bien que cela parfois est facteur de confusion. Mais la raison fondamentale de cette confusion est beaucoup plus liée à la méconnaissance de ce que pense le magistère de l’Eglise, quand celle-ci, je voudrais dire l’Eglise, a institué ces célébrations. L’une rappelle la célébration en l’honneur de ces témoins victorieux et désormais auprès du Père. La seconde est cette prière de l’Eglise en faveur des défunts, affirmant l’espérance de la communauté chrétienne en la vie éternelle donnée par la Résurrection du Christ. Expression de victoire l’une, l’autre espérance, et cela donne deux connotations spirituelles différentes.
RJDH : Dans la pratique des choses, les 1er et 02 Novembre, les chrétiens catholiques et d’autres dénominations célèbrent leurs défunts et profitent de l’occasion pour nettoyer et fleurir les tombes de leurs parents, amis et connaissances ; est ce qu’elles sont biblique ou simplement du syncrétisme ?
Père A. FAGBA : Je voudrais d’abord signifier que chez le catholique, une vérité de la foi, ou une pratique célébrative, peut venir, soit de la Sainte Bible, soit de la Tradition de l’Eglise, soit du Magistère, c’est à dire de la décision de l’autorité ecclésiale. Pour dire ce n’est pas parce qu’une pratique de la foi n’as pas de traces bibliques que l’on puisse la prendre obligatoirement pour une pratique syncrétique, non.
En ce qui concerne votre question, Oui le Syncrétisme apparait si déjà le premier Novembre on se rend au Cimetière pour décorer les tombes, alors que ce n’est pas ce que dit l’Eglise. Selon l’esprit de ces deux fêtes, ce mouvement doit se faire le jour suivant c’est-à-dire le 2 Novembre. Car c’est bien à ce jour où on se rappelle les morts de notre famille, de nos amis, de tous ceux qui nous sont proches. On se souvient de ceux qui sont partis. Et par le fait même, on n’oublie pas ceux qu’on a aimés ou qui nous ont aimés. Ce n’est pas parce qu’ils sont partis physiquement qu’on ne pense plus à eux. Et les fleurs déposées sur leur tombe traduisent fortement l’expression de l’amour entre eux et nous.
Mais pas seulement les fleurs, la prière et des bougies, pour souligner cette proximité fraternelle avec les défunts, et cela n’est pas contre Evangile. Car notre fois nous enseigne à croire que la vie continue après la mort. Et rappelons-nous ceci, le chef de notre foi, Jésus Christ est mort et est ressuscité. Nous sommes tous invités à cette vie.
RJDH : La tombe était alors tout à la fois témoin du passé et symbole glorieux, mais nous assistons aujourd’hui a une profanation des tombeaux et la transformation des funérailles a un endroit de distraction. Comment expliquez-vous cela ?
Père A. FAGBA : L’anthropologie africaine en générale et centrafricaine en particulier, nous invite à avoir de retenu et de vulnérabilité envers nos parents défunts, dont les tombes traduisent la présence symbolique, et les cérémonies des funérailles sont aussi des gestes témoins de l’amour qui nous lie à eux. Oui, nous assistons à une mutation de comportements dépravants, qui vont à l’encontre de cette considération anthropologique. Ces déviations ne sont pas centrafricaines en réalité, elles sont le fruit des antivaleurs importées de l’extérieur.
Le Contact de certains compatriotes, au monde ailleurs, les a poussés à importer quelque mode de célébrations et par contamination cela a touché bon nombre de couches sociales et même l’échelle nationale.
C’est ici lieu d’interpeler la conscience centrafricaine de faire un retour à ce que nous avons comme considérations anthropologico-cetrafricaines des morts. Oui, l’homme évolue par emprunt, comme on le dit en Anthropologie sociale, mais encore il convient de censurer ce que l’on peut emprunter. Nous ne devons pas emprunter ce qui va jusqu’à détruire la substance de l’acceptable, pour hériter l’irrespect, la profanation. A nous, déjà de mettre de mesure, pour ne pas voire en crise de valeur en ce domaine.
Ta question me permet de faire le lien à ces actes inciviques de destruction des tombés à volonté. J’insiste en disant que c’est un acte incivique car même dans la loi Centrafricaine cela est condamnable. Il convient d’interpeller le Ministère en charge de l’administration du territoire de procéder à des sanctions de dernière rigueur pour ne pas que cela puisse faire école. Une tombe peut être détruite pour exhumer le corps et enterrer ailleurs, mais cela se fait dans les règles d’art et non de manière incivique et anarchique.
RJDH : Abbé Xavier-Arnauld FAGBA, vous êtes le Cérémoniaire liturgiste de l’Archidiocèse de Bangui et Curé de la paroisse Saint Jacques de Kpetene, le RJDH vous remercie !
Père A. FAGBA : Merci cher journaliste !
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